Anne-Laure Honauer, une sage-femme qui invite au voyage en soi

Portrait Anne Laure Honauer

Sage-femme française qui a sillonné l’Afrique, Anne-Laure Honauer est désormais établie à Jerusalem où elle accompagne des femmes enceintes et des jeunes mères par le yoga. Interview d’une femme profondément positive.

Peux-tu retracer ton parcours ? 

Je suis sage-femme diplômée depuis 2007 de l’école de sages-femmes de Strasbourg. Après avoir travaillé à Strasbourg et à Bordeaux, je suis partie avec mon conjoint en 2010 vers d’autres horizons. J’ai travaillé au sein d’ONG comme Médecins du monde ou Première Urgence Internationale ou directement en maternité, en Mauritanie, au Tchad, en République Centrafricaine, en Haïti et au Niger. Je suis actuellement à Jérusalem où j’accompagne des femmes enceintes ou des jeunes mères par le yoga (prénatal et postnatal) grâce à une formation que j’ai suivi en 2018. J’ai aussi monté un atelier sur le périnée et une formation en ligne sur le périnée.

Tu n’en serais jamais arrivée là si…

…si mes parents n’avaient pas cru en moi. Ça fait un peu nunuche mais ils m’ont toujours soutenus, des qu’ils ont senti que c’était ce métier et pas un autre qui me permettrait de m’accomplir.

Tu as pratiqué le métier de sage-femme dans différents contextes. En matière de naissance et de grossesse, qu’est-ce qui t’a le plus marquée dans les différents pays où tu as résidé ?

Dans certains pays très pauvres, j’ai été terriblement marquée par le fait qu’une femme, quand elle se met en travail, accepte, presque résignée, qu’elle a temporairement un pied dans la tombe. Elle est prête à mourir pour donner la vie, c’est un risque conscient ! Cela génère chez moi un désir d’agir, presque aussi fort que de la rage !

Il me semble qu’aujourd’hui le yoga prend une place importante dans ta vie personnelle et professionnelle 

Comment y as-tu pris goût ?

J’ai découvert le yoga un peu par hasard, avec des amis puis j’ai rencontré une prof de yoga absolument formidable et tout a basculé 😁😁

Que t’apporte-t-il ? 

Le yoga m’apporte tellement de choses… Physiquement, mon corps est renforcé, solide, adapté. Mentalement, je suis plus calme, mon mental accepte de moins se faire entendre, ne serait-ce que quelques minutes par jour. J’ai retrouvé un accès à une certaine spiritualité, qui avait disparu depuis des années, et je me sens bien plus connectée avec tout ce et tous ceux qui m’entourent. Mes proches en sont les plus directs bénéficiaires ! Je suis très positive, pour tout !

Quelles sont tes postures de yoga favorites ? Pourquoi?

Les inversions. Elles me challengent mais je me sens bien la tête en bas !

Le yoga est spécialement bénéfique pour les femmes enceintes qui souhaitent rester en mouvement et se préparer à l’accouchement. Dans ta pratique de sage-femme, pourrais-tu illustrer les bienfaits avec un cas précis?

De plus en plus de femmes souhaitent accoucher « naturellement ». La pleine conscience, qui s’acquiert tellement bien à travers le yoga et sa philosophie, est une arme majeure pour vivre pleinement son travail et son accouchement, le ressentir et se faire confiance pour savoir où on va et ce que notre corps nous dicte, même si c’est un premier bébé. La respiration est aussi un atout incroyable pour gérer les contractions du travail. 

Le périnée, que la plupart des femmes ne découvrent qu’après leur première grossesse, n’a plus de secret pour toi. Pourquoi et comment en prendre soin ? 

En effet, le périnée devrait être connu et conscientisé par toutes les femmes, avant même leur première grossesse ou accouchement. Cet ensemble de muscles sera indispensable tout au long de la vie et devra rester tonique et entretenu afin de se prémunir contre les incontinences urinaires ou les descentes d’organes. De plus, un bon périnée va favoriser les sensations lors des rapports sexuels.

Pour en prendre soin il est important de savoir respirer en l’utilisant, de savoir le verrouiller quand nécessaire, de garder un dos bien droit et d’éviter à tout prix de faire des abdominaux qui sollicitent les muscles grands droits et créent ainsi une hyper-pression intra-abdominale qui délabre le périnée.

De nos jours, on met souvent en opposition les travail des sages-femmes et celui des doulas. Un partenariat entre sages-femmes et doulas, rêve ou réalité? 

Ce partenariat est à mon avis indispensable. Une future maman dont le projet est d’accoucher le plus naturellement possible à besoin de soutien, à chaque instant, sur chaque contraction pendant toute la durée de son travail. Bien sûr son conjoint peut l’aider, et il est indispensable qu’il se soit préparé lui aussi, qu’il sache quoi faire, qu’il connaisse sa place dans ce moment si intense, mais il est souvent surpris par cette intensité justement et un soutien un peu moins impliqué émotionnellement est une force !  La sage-femme peut bien sûr accompagner une femme en travail de manière totalement naturelle, et d’ailleurs la majorité des sages-femmes aiment ces accouchements plus que tout ! Mais avec la fermeture de toutes les petites maternités, les sages-femmes en hôpital ont de moins en moins de temps pour rester auprès d’une femme en travail car elles suivent souvent plusieurs femmes en même temps. C’est là que la doula, qui connait déjà la patiente et à toute sa confiance, lui sera indispensable pour mener à bien son projet de naissance. Je pense qu’il faudra un peu de temps pour que les sages-femmes acceptent la présence des doulas en salle de naissance mais ce sont les patientes elles mêmes qui pourront aider à ces évolutions, en le demandant, pour qu’elles puissent avoir l’accouchement parfaitement respecté qu’elles souhaitent tout en restant en total sécurité au sein d’une structure hospitalière.

Ce que tu aimes le plus au monde ?

Mes enfants, nos partages en famille.

S’il y avait 1h de plus dans une journée, comment la passerais-tu ?

A méditer, c’est vraiment le temps que je prends pour moi le plus difficilement.

Si tu avais un super pouvoir, que changerais-tu ?

Rien à voir avec ce dont on vient de parler, mais si j’avais un super pouvoir, il serait dédié à la protection de l’environnement.

Un livre, une association, une initiative que tu aimerais faire connaître ?

Oui, le livre « J’accouche bientôt. Que faire de la douleur » de Maïté TRELAÜN aux éditions Le souffle d’or.

Ainsi que le documentaire: « orgasmic birth : the best-kept secret » (1997) https://www.orgasmicbirth.com , une jolie façon de voir le travail très positivement.

Dans ce documentaire est interviewée (entre autre) une sage-femme américaine qui s’appelle Ina May Gaskin qui a fait un travail incroyable sur l’accouchement physiologique. http://inamay.com

Vous souhaitez contacter Anne-Laure?
anlore.lucas@gmail.com